dimanche, avril 10, 2005

La cérémonie des cent jours

Krabi le 8 avril

Le temple de Kao Kaw, le village de mes beaux parents n’a rien de somptueux; Une simple salle ouverte à tous vents où siège un Bouddha assis dans un coin. Hier matin, c’est là que nous avons célébré la cérémonie des cent jours, traditionnelle après un décès, et d’autant plus importante cette fois que le corps d’Aree n’a toujours pas été retrouvé.
Il s’agit, suivant la croyance bouddhiste, de permettre à son âme encore errante de pouvoir trouver le repos, afin de pouvoir démarrer un nouveau cycle. Celui ci n’est possible que si elle peut constater que ceux qui l’aimaient, la connaissaient, ont eux aussi retrouvé la sérénité, le calme, l’équilibre ont repris le chemin de la vie, contrôlé leur chagrin.
Rien à voir avec des obsèques telles que nous les connaissons. Le matin, sur la droite de l’estrade réservée aux moines, un portrait d’Aree entouré de fleurs du jardin qu’elle avait créé. Prières, offrandes aux moines de robes neuves et de nourriture, et rituel de l’eau et de la lumière, ces deux éléments majeurs de la vie où j’ai communié avec ses parents, ses frères et sœurs, ses plus proches amis. Pour la première fois de ma vie, j’ai vu Hen, ma belle sœur pleurer, à gros sanglots, comme si soudain elle réalisait…
Elle s’est vite reprise, aux cotés de ma belle mère. Dans cette famille, les femmes sont incroyablement fortes et dignes, d’un courage à toute épreuve.
Et les voilà en train de s’occuper avec tout le personnel du Jungle et du Grand Bleu, actuel et ancien, et de la famille de servir à manger à plus de 500 personnes qui défileront tout au long de la journée, pour accompagner Aree dans sa nouvelle vie, lui dire par leur présence qu'ils n'ont pas oublié et qu’elle peut aller en paix.
Plus de larmes, mais des rires, des sourires, des conversations, des enfants qui courent partout. La vie tout simplement.
Le soir, Assaleemala, un groupe de musique traditionnelle du sud de la Thailande, des amis que nous avions reçu plusieurs fois au Jungle de Phi Phi est venu jouer. Il sortait de dix jours de concert à Bangkok au profit des victimes du tsunami, ont fait douze heures de minibus pour être là. Mon beau père est monté sur la scène pour expliquer que, puisque sa fille était partie en paix, on pouvait danser pour lui montrer que nous sommes forts, que nous avons accepté. Alors ma belle mère, plus de soixante dis ans s’est levée avec ses amies pour danser des danses traditionnelles. Et c’était beau.
Ce n’est sûrement pas par hasard que ce matin, je me suis levé l’esprit apaisé, plus positif. Puiser dans le chagrin immense et la douleur l’énergie positive. Parce qu’on n’a pas le choix. Et parce qu’Aree là où elle est a souri en voyant sa mère danser. Même si je pleure en vous écrivant ces lignes. Mais je suis sûr qu’elle m’excuse. Elle a le cœur si grand.
Je vous embrasse.
Henri

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